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Railcoop, une entreprise privée ferroviaire comme les autres

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Alors que la ligne de train Bordeaux-Limoges-Guéret-Lyon par Railcoop devrait ouvrir dans l’année, La Convergence Nationale Rail et son collectif sud-normand s’expriment sur cette entreprise ferrovière privée.

Lors de sa création Railcoop (SCIC) annonçait mettre en place des trains sur les lignes qui avaient été abandonnées par la SNCF car cette dernière avait failli à ses missions de service public, notamment en n’irriguant plus tous les territoires. Critique certes justifiée mais sans pour autant en chercher les causes et les responsabilités politiques qui ont conduit au démantèlement de l’entreprise historique pour répondre à la libéralisation du ferroviaire, imposée par l’Union européenne. Il faut rappeler que cela s’est traduit en premier lieu par la séparation du réseau avec la création de RFF (1997), puis par l’ouverture à la concurrence au fret ferroviaire(2006) et pour finir par la loi LOM (loi d’Orientation sur les mobilités) en 2018 qui a consacré l’éclatement de la SNCF en 5 sociétés anonymes. Un nouveau cap pour ouvrir à la concurrence les services de voyageurs afin de pousser un peu plus loin la casse de l’entreprise publique et offrir de nouvelles parts de marché aux multinationales du transport. Pendant cette période on a très peu entendu ces coopérateurs, occupés qu’ils étaient à d’autres fonctions dans la direction d’entreprises (Energie..) inscrites dans les lois du marché, également dans le secteur ferroviaire (EPSF : établissement public de sécurité ferroviaire…)

Le gouvernement par la voix de son ministre des transports, M. Djebbari, soutient et promeut l’opération Railcoop car il y voit un argument pour justifier l’ouverture à la concurrence. Dans ce registre la FNAUT (Fédération nationale des associations des usagers des transports) est complètement investie dans cette démarche.

Aujourd’hui, l’annonce par Railcoop d’ouvrir dès décembre 2022 de nouvelles lignes rentre pleinement dans cette stratégie d’ouverture à la concurrence et ne la différencie pas des autres opérateurs guidés par les profits à venir et non par la nécessité de développer voire de maintenir le maillage du territoire. Elle sort du modèle vertueux qu’elle prétendait vendre au début de son abondante communication relayée par les média acquis à la cause libérale. On comprend mieux pourquoi des experts de ce modèle politique soutiennent de telles opérations voire, comme Mr Wauquiez, président de la région Rhône-Alpes-Auvergne, apporter leur concours par la « vente » de matériel roulant dont le prix reste secret.

En effet, dans la présentation de la nouvelle desserte Nantes-Lille en lien avec la demande faite auprès de l’Autorité de régulation des transports (ART) de réaliser un « test d’équilibre » pour savoir si les trains mis en place sont de nature à compromettre l’équilibre économique du contrat de service public conclu par l’AOT Normandie, on découvre la vraie nature et la stratégie de Railcoop.

On s’aperçoit que les horaires correspondent à quelques minutes près au tracé des trains TER existants. Ce qui pose la question de la substitution aux trains qui circulent actuellement. En fait, là où il existait des correspondances dans les grandes gares intermédiaires, c’est les remplacer par un trajet de bout en bout. Ce qui pour le reste ne changera pas grand-chose en termes de dessertes, car la très grande majorité des usagers utilisent ces trains dans le cadre du domicile-travail ou domicile-études. Neuf heures de voyage pour rejoindre Lille au départ de Nantes quand il est possible de le faire en un peu plus de quatre heures en TGV, il n’est pas sûr que cela draine beaucoup d’usagers. Les intentions sont forcément ailleurs.

Dans le cadre de l’accord réalisé avec la région Normandie et avec la complicité de la SNCF, il est prévu que Railcoop puisse exploiter en lieu et place de la SNCF les sillons existants au nom de la « substituabilité », mettant à mal la convention qui lie la région à la SNCF jusqu’à la fin 2029. Finalement, introduire par de petites touches l’ouverture à la concurrence.

Comme on peut le constater Railcoop n’apportera pas de nouvelles relations ferroviaires.

Ainsi, comme indiqué par l’ART dans sa réponse aux mesures d’instruction, « il est considéré que chaque SLO (services ferroviaires librement organisés) se substitue totalement au service Nomad Train et engrange ainsi 100 % de ses recettes ». La région a même prévu de financer de 1,5 à 2,5 millions le déficit d’exploitation. Il est écrit « les pertes potentielles de recettes seront compensées avec le montant des concours publics à la charge de l’AOT et en ne prenant pas en compte, à ce stade, les bénéfices nets pour les clients, les éventuelles économies de coûts pouvant résulter du non-remplacement de matériel roulant arrivant en fin de vie utile ou de personnel dont le contrat arrive à échéance. »

En clair, financer les pertes de l’opérateur privé et en profiter pour ne pas investir dans le matériel qui fait pourtant cruellement défaut et, surtout, continuer à supprimer des emplois de cheminots. Quant à la direction SNCF, elle ne trouve rien à redire, enfermée qu’elle est dans sa stratégie de réduction des coûts.

Bel exemple de la concurrence libre et totalement faussée. De plus, les usagers n’auront pas d’autres choix que de prendre les trains qui leur seront imposés par la ou les régions.

Quid de la responsabilité des élus des collectivités locales qui ont apporté leur concours financier avec de l’argent public pour finalement contribuer un peu plus au démantèlement du service public ferroviaire ?

Lire la suite sur le site de la CNR.