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Limoges Métropole et propagande participative

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C’est annoncé en grande pompe, sur des panneaux publicitaires comme dans les boîtes aux lettres avec Le Métropol : à Limoges Métropole on fait de la démocratie participative ! Quatre « conférences citoyennes » en un peu plus d’un mois sur quatre thématiques : mobilité, développement durable, solidarité, économie et emploi. Il s’agit en fait de la dernière étape pour valider ce qui est déjà officiellement pensé depuis 6 mois, sûrement plus, et qui ne tourne pas autour des envies et des besoins des habitant·e·s mais uniquement de la fameuse « attractivité du territoire ». Selon le Métropol :

A l’automne dernier, des groupes de réflexion réunissant chambres consulaires, fédération professionnelles et élus communautaires ont travaillé sur la question de l’attractivité et de l’accessibilité du territoire. Le Conseil de développement de Limoges Métropole, regroupant des citoyens des vingt communes et acteurs de la société civile, a approfondi ce travail.
Jusqu’à la fin du mois de juin vous êtes invités à prendre part à cette réflexion à travers un cycle de conférences-débats qui constitue le dernier étage de cette fusée qu’est « Le Pacte Métropolitain ».

Attractivité de qui ? Pourquoi ? Comme partout dans les métropoles, du cadre dynamique et des start-up. Un projet donc qui concerne l’ensemble des habitant·e·s... de par la gentrification qu’amène ce genre d’ambitions.

Un processus de décision bien huilé

Elus et entreprises privées préparent tout

Le processus est donc simple. Premièrement des élus décident qu’il faut travailler l’attractivité du territoire, ils organisent donc des groupes de réflexions. Ces groupes sont composés :

  • des chambres consulaires c’est-à-dire « des établissements publics d’État ayant pour rôle de représenter les acteurs du secteur privé des différents secteurs économiques et d’exercer pour leur compte des activités d’appui comme le développement du territoire ; » [1]
  • de fédérations professionnelles, représentant également les intérêts des entreprises privées ;
  • des élus de la métropole.

L’orientation de la réflexion est d’emblée organisée par et pour des entreprises privées. On comprendra tout de suite que l’intérêt général semble bien secondaire. Des grands axes sont pensés et élaborés et sont remis à un deuxième groupe de travail, en avril : le conseil de développement. Il va faire figure de représentation citoyenne alors même que tout semble déjà pensé.

Un groupe censé représenter la société civile fait la vitrine

Obligatoire pour les communes de plus de 20 000 habitants le conseil de développement n’a aucun pouvoir de décision et son avis est purement consultatif. A Limoges Métropole, il est présenté comme « issu de la société civile », dans la réalité il est constitué [2] :

  • d’un collège « citoyens » de 25 membres : un membre désigné au sein de chaque commune, soit 20 membres, un titulaire et un suppléant, plus 5 membres proposés par les conseils citoyens ;
  • d’un collège « associations » de 15 membres désignés au sein du milieu associatif ;
  • d’un collège « entreprises – structures socio-économiques et syndicales » de 20 membres désignés par les chambres consulaires, la chambre régionale de l’économie sociale et solidaire, l’Université, les organisations syndicales les plus représentatives du territoire (CGT, CFDT, FO, CFE-CGC, CFTC, U2P, MEDEF, CPME).

Il est difficile de savoir qui exactement compose ce fameux conseil de développement mais une chose est sûre c’est qu’il est loin d’être « issu de la société civile » : 25 personnes désignées par des élus, et une bonne partie de représentants des intérêts privés (chambres consulaires, syndicats patronaux et de cadres...). De plus, si l’on peut penser le collège associatif plus diversifié, nous ne savons pas comment ces 15 personnes (sur 60) sont choisies et il y a fort à parier que les élus désignent des personnes avec qui ils ont l’habitude de travailler, pas gênantes, et qui sont subventionnées donc dépendantes.

Qu’est-ce qui en ressort de tout ça ?

Ce conseil de développement a rédigé un rapport pour le « développement » du territoire. Introuvable, il est résumé dans Le Métropol pour notre plus grand plaisir. On y trouve pêle-mêle, et sans blague, des propositions comme la volonté de créer un « plan de marketing territorial » (sic) comme si nos villes étaient des entreprises, faire rayonner internationalement la métropole avec des événements, le fameux renforcement des grands axes (autoroutes/TGV/avion), l’embellissement du centre-ville (gentrification), la création d’un produit marketing pour identifier le territoire...
Mais il dresse aussi un bilan positif qui nous laisse sans voix : « Limoges Métropole est un territoire de création, où s’exprime une conception exigeante de la démocratie culturelle ». Exemple, elle « est deuxième en matière de création de start-up avec douze naissances en 2016 ». Ou encore le fait que l’Université se centre sur des « niches d’excellence », en total accord avec toutes les réformes de l’Université qui en font des pôles territoriaux sélectifs et avec des enseignements rentables.

Les fameuses conférences citoyennes sont donc guidées par tout ce beau travail où tout est déjà décidé en haut lieu. On pourrait même penser qu’elles ont été pensées en amont, justement dans l’objectif de marketing territorial cité précédemment. Les multiples affiches de conférences citoyennes se mêlent d’ailleurs très bien avec les affiches de Now, un événement au Zénith pour les entrepreneurs et les start-up, organisé par Limoges Métropole. L’important n’est donc pas que les habitant·e·s décident mais de communiquer sur la démocratie participative made in Limoges Métropole. On ne doute pas que le citoyen lambda aura alors un grand pouvoir de décision sur l’aménagement et l’avenir de son territoire. Comme le dit leur slogan publicitaire : « s’exprimer c’est agir », qui résonne de manière ironique avec le dicton : « la démocratie c’est cause toujours ».

La démocratie participative, nouvelle com, vieux fonctionnement

Si Limoges Métropole n’est pas Limoges, ne nous leurrons pas, même le nom nous l’indique, Limoges est au centre des intérêts. Les projets du « Pacte Métropolitain », sont centrés sur les intérêts des entreprises privées de Limoges sans prendre en compte les communes environnantes. Par exemple, l’augmentation des grands axes afin de faire rayonner Limoges Métropole prend-il en compte les nuisances pour toutes les communes qui verront encore des terres se faire bétonner et les flux routiers augmenter ? La centralisation des activités autour de Limoges continuera également de détruire les campagnes, anéantissant un peu plus la vie rurale et favorisant les exploitations agricoles industrielles... Il s’agit en réalité du même fonctionnement que celui de toutes les métropoles : agrandir l’influence du centre urbain le plus gros, les petites communes passant en second plan, rien de démocratique là-dedans. En passant, pour la communauté d’agglomération de Limoges, il ne s’agit pas réellement d’une métropole, elle en a les ambitions mais pas le statut.

Mais à Limoges, pas la métropole mais la ville cette fois, on a l’habitude de dire qu’on fait de la démocratie de proximité en faisant exactement l’inverse. Ainsi, on retransmet les conseils municipaux sur Internet et on prend des décisions rapides, destructrices sans laisser le temps à une opposition de se créer. Les exemples sont nombreux : fermeture de la piscine de Beaubreuil, fermetures d’écoles, fermeture de salles municipales et location payante des autres, toilettes publiques payantes, mise en place de la vidéosurveillance et armement de la police municipale... Qui a eu son mot à dire là-dedans ? L’opposition balbutiante qui a tenté de se créer à chaque attaque de la mairie s’est faite balayée par la rapidité de la mise en œuvre.

Si nous n’attendons rien de Limoges Métropole leur propagande nous est insupportable. Face à la communication des métropoles-entreprises et leur pouvoir destructeur organisons-nous pour construire nos alternatives de manière horizontale.