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Distribution de tract à Limoges : 90 euros d’amende

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Un gilet jaune verbalisé pour « distribution de tracts » à Limoges lors de la dernière action, mercredi 13 mars.

Compte-rendu de l’action des gilets jaunes, mercredi 13 mars, au rond-point de La Valoine, par un des participants :
« Salut les copains, j’en ai une bien drôle a vous raconter ! voilà ce qui vient de m’arriver avec les Gilets jaunes de Limoges...
Avec les copains Gilets jaunes, on avait décidé de se montrer sur les ronds-points Nord et Sud. Je me pointe d’abord à Grossereix, là je vois notre copain à bonnet péruvien seul (je préserve son anonymat...)... Enfin pas vraiment il avait trois fourgons de poulets et leur contenu autour de lui. Comme ils avaient l’air assez énervés (le manque de grains ?) et qu’ils nous disaient que soit on dégage soit ils nous embarquent et qu’on était deux et eux une dizaine... ben on dégage, mais pour rejoindre les copains au rond-point de la Valoine qui y étaient une vingtaine.
On arrive là-bas, et on y retrouve nos poulets arrivés bien avant nous (passons sur le fait que j’avais pris pourtant le chemin le plus court et pile à la vitesse limite, je serais curieux de connaître leur vitesse de croisière...). Attendez, partez pas, c’est long mais vous allez vous marrer à la fin, promis.
Les flics nous expliquent qu’on doit partir, qu’on a pas le droit ni de rester sur le rond-point ni de distribuer nos tracts, qu’au mieux ils veulent bien qu’on distribue en ville. Après avoir appelé une pote avocate, je m’étonne de deux-trois trucs auprès d’eux : où sont passés leurs matricules ? Quelle est la loi qui nous interdit le tractage ? Première fois qu’on m’en parle alors que je tracte depuis mes quinze ans... En quoi, vu qu’il est permis de circuler sur la voie publique, serait il interdit de circuler sur et autour du rond-point ? Sans répondre là-dessus, ils partent.
Comme on est des démocrates, nous les Gilets jaunes, on discute et on fait un vote sur la suite de l’action. Et comme on est très détendus, on choisit une solution assez paisible : on décide de rester, de tracter sans bloquer et sans gêner la circulation (en gros on reste sur le trottoir et les bagnoles qui veulent nos tracts ouvrent la fenêtre). Tout se passe bien, super accueil (plus de 2 000 tracts distribués en 1 h 30), beaucoup de klaxon et de messages de soutien et pas plus de blocage qu’habituellement après 16 heures à ce rond-point. Et là les flics reviennent... et là vous allez rigoler...
Comme prévus dès qu’on les voit, on se prévient et on arrête tout tractage, je pars donc rejoindre les copains et je traverse bien sagement au passage clouté. Mais ils descendent du fourgon, me bloquent, me demande mon identité. Celui qui semble le chef commence à m’engueuler en mode "tu ne comprends pas le français, on vous avait dit de dégager ou d’aller en ville"... Puis ils me verbalisent : PAM ! 90 euros qu’ils peuvent majorer à 135 !
Toujours cordial, je m’en étonne (je ne leur dis même pas que oui le français je le comprends et je l’enseigne mais que c’est leurs ordres qui me posent problème pas la langue qui l’exprime), je demande à nouveau qu’on me cite la loi et d’avoir leurs matricules. On me montre, sur la même tablette qui sert à me verbaliser, l’article R412-52 du Code de la route qui interdit de tracter aux occupants d’un véhicule et un flic me donne son matricule (mais ne le portait pas). Première fois que je vois ça et des distributions de tracts à des véhicules j’en ai fait et vu en tant qu’automobiliste aussi !
Avec les copines et les copains, on s’étonne de tout ça : pourquoi me verbaliser moi alors qu’on est une vingtaine dans l’action ? Pourquoi même commencer aujourd’hui à verbaliser alors que depuis quatre mois on ne compte plus le nombre de Gilets jaunes qui ont distribué des tracts à des bagnoles sur des ronds-points ?
Là, c’est la valse à la connerie :
On m’a verbalisé parce qu’on m’avait prévenu, "comme je fais avec mes enfants", dira le chef, et si on m’a choisi c’est parce que je suis un des leaders et une grande gueule ! Alors ça c’est magnifique, dans le groupe Gilets jaunes unis 87, si on est ok sur un truc c’est bien sur le fait de ne pas choisir de chef. Du coup c’est les flics qui les désignent ! J’ai pas de bol, un peu plus et ils choisissaient la panthère en peluche qu’on trimbale dans nos manifs ! En plus, disent-ils, je devrais être bien content parce que s’ils veulent ils peuvent m’embarquer... pour des T-R-A-C-T-S ! Enfin ils nous disent qu’ils ont fait preuve de "mansuétude et de générosité" puisqu’ils nous avaient gentiment permis d’aller distribuer en ville...
Et pour la deuxième question, les flics nous expliquent que si maintenant ils appliquent la loi et verbalisent c’est parce que "le mouvement s’étiole donc on verbalise" (on avait des flics supers forts en vocabulaire !). Donc en gros, c’est la police qui décide de la fin du match, quand y a du monde sur les ronds-points tout va bien ils laissent tracter, quand ça "s’étiole" ils verbalisent, et tout le monde rentre au vestiaire... et tant pis pour le droit à l’information, tant pis pour le droit de manifester, tant pis pour la démocratie...
Médias et politiques peuvent bien se marrer sur l’Algérie, en mode "y a pas de démocratie, là-bas, regardez le même président voulait y être élu une cinquième fois", mais nous quel est l’espace démocratique quand, en plus d’en prendre plein la gueule chaque week-end dans les grandes villes, on peut t’embarquer ou te verbaliser pour un tract donné tranquillement sur un rond-point de Limoges ? Est-on bien mieux loti démocratiquement nous qui ne comptons plus le nombre de présidents élus pour le "changement maintenant" ou contre "la fracture sociale" ou plein d’autres promesses toutes plus égalitaires mais qui finissent tous par appliquer le programme des libéraux comme Alain Minc et à nous en mettre plein la gueule ? J’ai été bien long mais il fallait que ça se sache. Je vais conclure...
Pour toutes ces raisons, parce que ce n’est pas les flics qui décideront quand le mouvement s’arrêtera et si on a des chefs, on doit continuer comme ça. Sans chefs, et en retournant sur les ronds-points puisque, apparemment, c’est bien ce qui fait flipper flics et gouvernement, que les Gilets jaunes repartent des bases. Donc, avec les copines et copains on a décidé de continuer à se montrer à la Valoine, avec des pancartes cette fois puisque là, y a aucune loi qui l’interdit, et on continuera à donner des tracts mais en ville... Et on va y revenir, et si vous nous rejoignez, si on est plus nombreux, si on montre qu’on est loin de "s’étioler" on redistribuera des tracts aux bagnoles puisque flics comme gouvernement, ici ou en Algérie, ne comprennent que ça, le rapport de force.
 »

Petite précision : le copain n’a pas signé le PV, il n’était pas en flagrant délit de tractage au moment de l’interpellation et absence de matricule du flic. Une action en contestation de la validité du PV va être intentée.

Dès vendredi les actions vont continuer et samedi 16 mars participation à la manifestation climat, rendez-vous 11 heures devant la mairie, après-midi nouvelle action.
19 mars, participation à la manifestation interprofessionnelle, 11 heures place Tourny.



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