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Affaire du 8 décembre 2020 : une parodie de justice

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Croire en la justice : c’est croire au Père Noël.

Du monde, des membres de la famille des inculpé.es, des ami.es proches, des militant.es, quelques journalistes… Ça s’embrasse, ça discute, on se serre pour laisser de la place sur les bancs de la 16e chambre du Tribunal judiciaire de Paris aux derniers arrivants. Les deux oiseaux de malheur (procureur.es) sont déjà installé.es sur leur perchoir.

Ce vendredi 22 décembre, jour du délibéré, il est un peu plus de 10 heures, retard de la présidente du tribunal qui arrive, visage fermé, accompagnée de ses deux assesseuses. Elle toise, de son regard méprisant, le public debout dans la salle avant de lâcher son « vous pouvez vous asseoir ». D’entrée de jeux, elle tient à relire (au cas où cela aurait été oublié) dans la quasi-intégralité les articles 421-1, du Code pénal définissant les actes de terrorisme, et 421-2-1 « Constitue également un acte de terrorisme le fait de participer à un groupement formé ou à une entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits, d’un des actes de terrorisme mentionnés aux articles précédents ».
S’en suivent les premiers grognements des soutiens qui lui font annoncer qu’elle n’hésitera pas à faire expulser tout le monde à la moindre réaction de contentement, ou de mécontentement, au fur et à mesure de sa lecture. L’air se charge d’électricité, la présence, plus importante que d’habitude, des policiers dans la salle n’augure rien de bon.
Le verdict tombe démontrant un véritable acharnement judiciaire à l’encontre des camarades. Iels sont jugé.es coupables : d’« association de malfaiteurs terroriste ».

Des cris s’élèvent :

« C’est vous les terroristes ! »
« 4 semaines de procès pour rien ! »
« C’est une parodie de justice ! »

Madame est vexée, elle demande que la salle soit évacuée. Elle ne tient pas à prolonger la séance dans ces conditions. Elle se retire sous les huées. Les avocat.es discutent avec les prévenu.es, parlementent avec la juge. Il est décidé que seules les familles et les prévenu.es restent.
Les soutiens sortent en gueulant, et en chantant « À bas l’État policier » se regroupent sur le parvis. Le moral est à l’image du temps (pluie, vent, ciel gris). Une batucada tente de donner du baume au coeur. Des informations arrivent, au fur et à mesure, sur les portables. Chacun, chacune tentent d’entendre et de bien comprendre les peines annoncées. Une question reste en suspens concernant Libre Flot : va-t-il retourner en prison ? Heureusement non, mais cela ne tient pas l’iquité de Madame la présidente du tribunal.

Des journées de travail, les requêtes demandées, les plaidoiries des douze avocat.es… pschitt balayées d’un coup de manche de Madame la juge.

Vendredi 27 octobre, le dernier jour du procès, les ultimes déclarations des inculpé·es et les plaidoiries, par leurs avocat·es, politiques, riches, fines, saupoudrées d’humour et d’humanité se sont heurtées à un mur de répression qui a tout juste tendu l’oreille.
Malgré un dossier vide « La réalité de ce dossier, c’est qu’il n’y a ni groupe ni projet violent, mais des modes de vie alternatifs qui échappent à l’accusation », selon Coline Bouillon et Raphaël Kempf, avocats de Libre Flot, fabriqué de toutes pièces, le Parquet national anti-terroriste (PNAT – crée en juillet 2019) décide de maintenir les accusations de terrorisme et réclame à l’encontre des inculpé·es :

L : 2 ans d’emprisonnement avec sursis simple, 1 500 € d’amende, 10 ans d’interdiction de détention d’armes.
M : 3 ans d’emprisonnement, dont 2 ans sursis probatoire, 10 ans d’interdiction de détention d’armes.
C : 3 ans d’emprisonnement avec sursis et probatoire, 1 500 € d’amende, 10 ans d’interdiction de détention d’armes.
 : 3 ans d’emprisonnement avec sursis probatoire, 10 ans d’interdiction de détention d’armes.
W  : 4 ans d’emprisonnement, dont 3 ans avec sursis et probatoire, 10 ans d’interdiction de détention d’armes.
 : 5 ans d’emprisonnement, dont 4 ans avec sursis et probatoire, 10 ans d’interdiction de détention d’armes.
F : 6 ans d’emprisonnement avec mandat de dépôt différé, plus 3 ans de sursis, 10 ans d’interdiction de détention d’armes.
POUR TOUS.TES :
1/ Inscription au Fichier des auteurs d’infractions terroristes (Fijait, créé en 2015) qui a des implications lourdes pendant au moins dix ans (pouvant être renouvelable une seconde fois de 10 ans) :

➠ Justification trimestrielle de son adresse.
➠ Déclarer ses changements d’adresse dans un délai de quinze jours au plus tard après ce changement.
➠ Déclarer tout déplacement à l’étranger dans un délai de quinze jours au plus tard avant ce déplacement.

2/ 10 ans d’interdiction de détention d’armes.

* Précision au sujet du « sursis probatoire » : cela signifie une injonction de soins, un suivi SPIP et une obligation de travailler.

Une hargne punitive jusqu’au bout

Il n’est pas nécessaire qu’un projet aboutisse, ni que les membres se connaissent, ni qu’ils se rattachent à une organisation terroriste connue, pour être reconnu coupable d’association de malfaiteurs terroriste.
Seul L, échappe à une inscription au Fijait.
Iels, sauf L, ont l’interdiction d’entrer en contact pour une durée de 3 ans. Disposition que le PNAT n’avait pas requise.
Tous.tes : interdiction de port d’armes durant 10 ans.

L : 2 ans d’emprisonnement avec sursis simple.
M : 3 ans d’emprisonnement dont 15 mois avec sursis probatoire.*
C : 3 ans d’emprisonnement dont 2 ans avec sursis probatoire.*
B : 3 ans d’emprisonnement avec sursis probatoire.*
W : 3 ans d’emprisonnement dont 20 mois avec sursis probatoire.*
S : 4 ans d’emprisonnement dont 25 mois avec sursis probatoire.*
F : 5 ans de prison dont 30 mois avec sursis probatoire.*
*Iels n’iront pas derrière les barreaux, mais pour les mois qui restent (peine ferme déduit du sursis probatoire) le tribunal demande qu’ils soient aménageables en prison à domicile (bracelet).

La répression tente de nous broyer, mais nous ne nous laisserons pas anti-terroriser

et pour reprendre la citation à la barre d’un des inculpé.es : « L’avenir, c’est la solidarité ! ».
Salut à vous. Merci à tous.tes !
Merci de ne jamais avoir courbé l’échine.
Merci pour votre combat face à l’injustice.
Merci à celles et ceux qui vous ont soutenu.

Merci d’avoir su gueuler quand c’était trop insupportable d’entendre des propos méprisants, mensongers.
Merci pour cette ambiance combative, festive dans un lieu si hostile.

Merci à celles et ceux qui ont tenu à jour les blogs :
https://soutienauxinculpeesdu8decembre.noblogs.org/
et
https://soutien812.blackblogs.org/category/nouvelles-du-8-12/
Merci pour les comptes-rendus rédigés des audiences, jour après jour, avec une plume sensible, humoristique, incisive.
Merci à Crayon de luttes illustrant si bien les propos (dont quelques dessins ont été chipés pour ce doc.).
Merci pour les textes, les documents qui enrichissent notre réflexion afin de ne pas accepter l’inacceptable ; ces écrits alimentent notre résistance face à la machine judiciaire, instrument d’une société qui ne cherche qu’à broyer, criminaliser celles et ceux qui la contestent.

Merci pour cette déclaration, digne et courageuse, face à la juge, de C. : « Je n’ai jamais été une terroriste, mais je suis fière des luttes politiques que je porte et des idées que je défends. Je sais qui je suis et je partirai de ce tribunal avec ça. »
Merci à vous et courage pour les prochains jours.
Nous serons, au moment voulu, à vos côtés
pour lutter et chanter avec vous :

https://soutien812.blackblogs.org/category/videos/

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