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Une visite fédératrice, un confinement assumé, au squat du 4 bis, avenue de la Révolution

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Jeudi 9 avril dans la matinée, un drone survole la cour du 4 bis, avenue de la Révolution. Peut-être vient-il vérifier que des petits Covid-19 ne se promènent effrontément sans masque et sans respecter la distance préconisée par les consignes de précautions sanitaires.

Jeudi 9 avril à 16 heures est attendue la directrice de la direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations de la Haute-Vienne (DDCSPP) . Vous en penserez ce que vous voulez, mais le hasard quand même...

Quelques jours auparavant, les habitant.es de ce lieu de vie ont eu vent que la directrice de la DDCSPP cherchait à les joindre pour proposer des solutions d’hébergement temporaire dans le contexte du confinement. Un échange de mail, et rendez-vous est pris pour le jeudi 9 avril à 16 heures dans l’enceinte du 4 bis.

Ci-dessous, une partie du résumé rédigé pour le blog Chabatz d’Entrar.
Ben oui, la rédactrice est un tantinet feignante et ne va pas se taper deux fois le boulot, même si elle en a le temps....

Décor :
La cour du squat sous un soleil de plomb, un cercle formé par plus de soixante chaises dont la distance entre chacune est d’un mètre. Ça fait un beau cercle, non !

Protagonistes :
. Une bonne cinquantaine d’habitants (« à protéger » selon le point de vue de l’État), six habitants de la Cantoche et deux personnes du collectif Chabatz d’Entrar.

. Mme Marie-Pierre Muller, directrice de la DDCSPP, Mme Patricia Maïssa, directrice adjointe du pôle urgence de l’Association de réinsertion sociale du Limousin (ARSL), trois personnes de l’Équipe mobile psychiatrie précarité (EMPP) de l’hôpital psychiatrique Esquirol, et trois personnes de la Croix-Rouge.

Presque tout le monde porte un masque.

Déroulé :
16 h 15 tapantes, tout le monde prend place.
Mme Muller se présente et présente les personnes qui l’accompagnent. Puis elle expose les motifs de sa venue à savoir « la possibilité à des familles et des célibataires de bénéficier de places d’hébergement d’urgence, dans le cadre du confinement lié au Covid-19 ». Ainsi que quelques dispositifs permettant de faciliter le quotidien des personnes confinées (alimentation, hygiène, suivi scolaire). Elle insiste sur le fait que le temps de cet hébergement est lié aux mesures gouvernementales dues à la pandémie du Covid-19. Que cette proposition est basée sur le volontariat des personnes, qu’elles peuvent partir quand elles le souhaitent (même avant la fin de la pandémie). Elle ne demande pas une réponse aujourd’hui, que les personnes prennent le temps de réfléchir. Puis, si elles souhaitent bénéficier de ces hébergements, elles devront se rapprocher des services du 115.

Comment ? le 115 a des places !

Le secteur hôtellerie est touché, des chambres sont vides… des associations, au niveau national, ont alerté à plusieurs reprises sur les difficultés pour les sans-abri de se confiner… du coup le gouvernement a bien été obligé de bouger et donc, « miracle », une ligne budgétaire a vu le jour pour réserver des chambres et maintenant le 115 est doté d’un nombres de places disponibles… mais, attention, jusqu’à la fin du confinement. Ce putain de virus ne serait pas mortel, je leur conseillerais presque de se promener avec dans leur poche, comme ça ils ne dormiraient plus dehors.

Quand les habitants ne se laissent plus berner 

Les habitants avaient préparé sa venue et savent lire entre les lignes. Pour la plupart, ils sont passés par les divers dispositifs d’hébergement d’urgence (qui signifie temporaire) ou autres. Mais surtout, ils n’en veulent plus de ce type d’hébergement précaire, avec l’instabilité qu’il comporte. Instabilité matérielle et plus cruellement psychologique, conséquences démultipliées pour les foyers avec enfants.

La lecture d’un texte par l’un d’entre eux, texte réalisé collectivement la veille (lire la pièce-jointe), a élevé le débat au plan politique (dans le bon sens du terme) et non plus confiné au plan sanitaire. Les propos de ce texte répondaient à Mme Muller et indirectement aux représentants de l’État : Mesdames, Messieurs, merci de bien vouloir prendre soin de nos vies, mais ça nous savons le faire, et ce que nous vous demandons c’est des papiers nous permettant de faire partie intégralement de la population française. Ainsi nous pourrons continuer à prendre soin de nous, de notre famille, nous pourrons travailler, payer des impôts, etc. Nous ne voulons plus dépendre d’associations caritatives (pour autant nous les remercions chaleureusement de leur travail). Nous voulons garder notre dignité d’être. Pour cela, nous avons besoin de papiers. [1]

Pas la peine de préciser que Mme Muller a botté en touche, elle ne représente pas le service des titres de séjour et qu’à ce titre elle ne peut que reformuler sa proposition. Elle s’est présentée comme une fonctionnaire ayant un champ d’intervention précis, dont acte. Toutefois, elle s’est engagée à des actions ponctuelles (livraison de produits sanitaires et d’hygiène pour laquelle elle a immédiatement missionné la Croix-Rouge, engagement à contacter les écoles de rattachement des enfants pour proposer des aménagements). La Cantoche pourra vérifier dans quelque temps le résultat de cet engagement. Elle s’est également engagée à relayer et faciliter des démarches pour les habitants… Mais elle a également précisé que les habitant.es vivaient dans un lieu précaire puisqu’il y avait une décision de justice rendue à savoir : 15 juillet 2020, vous devez dégager. Attention, elle ne proférait pas une menace. Mais les personnes vivant avenue de la Révolution doivent avoir conscience du fait...

Merci à eux ! Ils redonnent la patate

Cela fera bientôt un an que femmes, hommes et enfants vivent ensemble dans cet espace qui, pour moi, en entendant leurs propos a réussi son pari : devenir un lieu de vie. Je n’ai jamais ressenti autant de cohérence et de cohésion entre eux que ce jeudi après-midi car ils ont démontré par ce texte que leur prochaine bataille va être les papiers pour tous et toutes. Comme cela a été souligné par l’un d’entre eux, le confinement ils l’ont vécu bien avant la pandémie en étant privé de leur liberté par l’administration française.

Leur besoin se résume par une phrase : donnez-nous un titre de séjour avec autorisation de travail, pour le reste on se débrouillera.



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