Les médias mainstream sont d’une part aux mains de grands groupes capitalistes, mais en plus les journalistes qui y travaillent sont le plus souvent imprégné-e-s de l’idéologie capitaliste. Pour s’en convaincre il suffit de regarder les patrons de la plupart des groupes médiatiques ou encore de consulter les nombreux ouvrages et enquêtes spécialisés dans la critique des médias [1]. Mais une fois ce constat fait, que fait-on ? Et pourquoi faire quelque chose ?
La parole que l’on offre sur nos luttes
Les luttes qui nous traversent et que nous traversons vivent de bien des manières. C’est souvent dans le quotidien que l’on ressent au plus fort comment elles peuvent nous changer autant que nous voulons de systèmes : capitalisme, patriarcat, colonialisme... Et finalement nous pouvons parfois nous poser la question : pourquoi communiquer, analyser, écrire sur des choses qui ne peuvent que se vivre ? C’est l’action qui transformerait la société et non notre discours sur l’action.
Pourtant, l’imaginaire est un élément fondamental de notre rapport au monde. Au quotidien, les médias mainstream nous bombardent d’un imaginaire fondé sur la réussite individuelle basée sur la consommation et l’individualisme mais aussi d’un cynisme forcené sur l’impossibilité d’alternatives au monde actuel. Nos luttes doivent donc se situer également sur le terrain de l’imaginaire : artistique bien entendu mais aussi médiatique. Raconter nos luttes, complexifier notre pensée avec des analyses, créer des imaginaires et des enthousiasmes communs c’est aussi par des médias autonomes que ça passe.
Lorsqu’on lit un retour sur une action, une manifestation, cela permet de partager des émotions : colère, joie, tristesse... C’est la création d’affects communs qui est importante. Des grèves, des luttes de petite ou grande ampleur sont présentes partout dans la société mais elles sont bien souvent invisibilisées. Les publiciser c’est rendre visibles et vivantes les frictions d’un monde qu’on nous présente comme allant de soi et donner de l’espoir. Plus il y a de luttes, plus elles se favorisent les unes les autres : encore faut-il que nous puissions en avoir connaissance. Faire passer sa lutte dans sa boîte, son école, sa rue, ... auprès de ses proches, son syndicat ou sa liste mail est bien mais pourrait inspirer beaucoup d’autres personnes.
Alors vive les réseaux sociaux : une caisse de résonnance à grande échelle ?
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Face à l’importance de parler de ce qu’on vit, beaucoup d’entre nous choisissent de passer par les réseaux dit « sociaux ». On nous a même présenté certains comme étant ce qui a permis l’avénement des révolutions du Jasmin ou encore les Gilets jaunes. Pourtant, à l’heure où les journalistes indépendants sont de plus en plus censurés voir criminalisés [2], les réseaux sociaux ne sont pas en reste. Twitter vient d’être racheté par Elon Musk, milliardaire d’extrême droite qui commence dès à présent à supprimer des comptes comme @crimethinc [3] mais auparavant des comptes relais de luttes avait déjà été bloqués comme Marcel Aiphan. Facebook a activement cherché à invisibiliser des pages de luttes comme Lille insurgées, Nantes révoltée, Cerveaux non disponibles, ... notamment pendant les Gilets jaunes ou à l’approche du contre-sommet du G7 de 2019 [4]. Idem pour Instagram avec Cerveaux non disponibles par exemple.
Il est donc raisonnable de penser que dépendre des GAFAM pour raconter nos luttes ne semble pas entièrement judicieux et que l’autonomie médiatique est un sujet important. D’autant plus que, lorsqu’on veut avoir des luttes qui s’enrichissent, se construisent, se répondent, il est nécessaire d’en avoir la mémoire. Et les réseaux sociaux, focalisés sur l’instantanéité sont également très faibles pour ancrer nos récits sur du moyen ou long terme. Même si on peut trouver une certaine utilité à les utiliser, nous devons prendre en main nos propres outils de transmission de l’information.
Le réseau mutu : automédias participatifs et sécurisés
De nombreux médias autonomes existent et c’est la variété qui en fait la force. Au sein de la grande diversité de ces médias de luttes, labogue.info fait partie du réseau Mutu. Un ensemble de sites qui mettent en commun logistique, pratiques, réflexions pour permettre aux infos locales d’avoir une visibilité et de s’inscrire dans des dynamiques de luttes globales. S’inscrire et proposer des articles, des photos, des événements c’est contribuer à faire vivre nos luttes et à les renforcer. A l’heure où les médias, le patronat et le gouvernement mènent des attaques de plus en plus violentes contre nos vies, il est primordial de se réapproprier notre pouvoir à échanger et communiquer.
Ne restez pas isolé.e.s dans vos luttes ou vos rages, participez à labogue.info
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