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RD 704 : le mensonge de la sécurité routière

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Le projet d’aménagement de la D 704 dont un article résume la teneur ici c’est 10 millions d’euros, 200 tonnes de bitumes, 18 hectares menacés pour créer une voie de dépassement de 3 km. L’absurdité du projet semble assez évidente mais comme toujours dans les aménagements routiers l’argument phare, imparable, est celui de la sécurité routière. En effet, quand des vies sont en danger comment peut-on s’opposer à une « action de mise en sûreté » ?

Dans le cas de l’aménagement de la D 704 le département nous présentent ses chiffres : 7 accidents sur la portion de 2016 à 2022 [1]. Un peu plus d’un par an sur une portion de 3 km. On ne peut pas douter de la véracité de ces chiffres qui sont agrémentés d’une carte et d’un tableau pour montrer le sérieux du décompte.

Seulement, si l’on prend toutes les données disponibles par l’Observatoire national interministériel de la sécurité routière (l’ONISR) dont la carte est tirée on se rend compte que les chiffres sont strictement les mêmes en étendant la période de 6 à 10 ans. [2] Ce qui fait passer le taux d’accidents à 0,7 accident par an. Dont la majorité se situe sur 2 années : 2 accidents en 2016 et 3 en 2018. En utilisant les même méthodes que le département on peut dire que sur les 3 dernières années il n’y a eu qu’un accident sur la section. On fait bien dire ce qu’on veut aux chiffres.

On remarque également qu’il n’y a absolument aucun accident mortel en 10 ans et que presque la totalité des accidents a lieu aux intersections (4 sur la portion). Sur la D 704 entre le Vigen et Saint-Yrieix-la-Perche en 10 ans on voit qu’il y a bien d’autres lieux d’accidents dont certains mortels.

Si cette portion de route a effectivement un aménagement qui n’est pas idéal et qu’il est nécessaire de penser à la question de la sécurité routière sur cette portion on est loin de la route mortelle que dépeint le département. Il n’hésite d’ailleurs pas à tordre la réalité pour passer d’intersections dangereuses à des dépassements dangereux pour justifier une voie... de dépassement :

La plupart des accidents les plus graves sont causés par des pertes de contrôle ou des dépassements mal maîtrisés, causant des chocs frontaux. C’est le cas du dernier accident recensé, résultant du choc entre un véhicule léger venant du Vigen et tournant à gauche sur la VC 4, fauchant un motard arrivant dans le sens opposé, très grièvement blessé.

Avec 10 000 à 15 000 véhicules par jour et la volonté d’augmenter le trafic sur cet axe également emprunté par des tracteurs, sur ce bout de route qui mène au méthaniseur, et des poids lourds, peut-être que la sécurité n’est pas le premier enjeu... D’ailleurs augmenter la vitesse et concentrer la circulation sur 2 croisements au bout d’une accélération n’est pas franchement signe d’une meilleure sécurité.

Ainsi quand le département évoque le plan de déplacements urbains il n’hésite pas à se targuer d’être compatible avec des objectifs de réduction des infrastructures et de limite de la vitesse. Face au point du PDU qui vise à :

Réduire les vitesses pour limiter les nuisances :
Mesure 1 : Réduire la vitesse autorisée sur la RD
Mesure 2 : Réduire la vitesse autorisée sur l’A 20
Mesure 3 : Réduire les vitesses dans le tissu urbain

La justification du département est lapidaire : Le projet n’est pas concerné par cette mesure. Pourtant, baisser les vitesses (alors que la voie de dépassement occasionnera un passage à 90 km/h) est souvent un des outils utilisés pour les petites portions dangereuses, sur lesquelles on met d’ailleurs également des radars automatiques.

Face à un projet totalement démesuré, qui cache son véritable enjeu, le département utilise la carte de la sécurité sans avoir tenté aucun aménagement minimal sur la portion pour faciliter la visibilité et faire baisser la vitesse.

Ne parlons même pas du danger réel que constitue cet axe pour les transports moins polluants comme les vélos qui sont pourtant censés augmenter dans nos déplacements. L’aménagement empêchera tout bonnement l’utilisation du vélo sur la portion mais le département va aménager une voie verte qui prendra un détour immense par Saint-Jean-Ligoure. La voiture individuelle doit rester le seul objectif alors que le meilleur moyen de baisser le nombre d’accidents c’est de baisser le nombre de voitures.

Les accidents, la pollution, un enjeu de santé

Alors que les accidents sont plus spectaculaires comme atteinte à la santé, le département s’étale moins sur les 11 habitations qui vont être touchées par l’augmentation des polluants atmosphériques comme en témoigne leur propre étude. Sans parler des terres agricoles à proximité. Les impacts sur la santé sont, à plus long terme, moins visibles et moins démontrables mais n’en restent pas moins réels. Les habitant-e-s remercieront chaleureusement le département d’écrire tout à fait tranquillement :

En 2043, dans la situation avec aménagement les émissions augmenteront par rapport à la situation sans aménagement pour la majorité des polluants, sauf pour le benzène, les composés organiques volatils et le butadiène. La hause s’explique par l’augmentation du taux annuel de croissance du trafic dans le cas de la réalisation du projet, qui passe de + 0,4 % à + 0,5 %, et par l’augmentation de la vitesse à 90 km/h sur le tronçon avec voie de dépassement. Le renouvellement du parc automobile et les progrès technologiques des véhicules automobiles ne permettront pas de compenser les émissions supplémentaires liées au changement des conditions de circulation sur la RD 704.